Solitude. | PV. Dawn Heather

L'homme venait de sortir du pub, ce qui n'eut pas le mérite d'enjouer particulièrement Dawn qui n'avait pas eu le temps de décompresser. Elle sentait en elle monter les larmes qu'elle se refusait d'évacuer devant eux, gardant pour seule expression un masque frigide et renfrogné. Le cliquetis de sa canne se rapprochait alors qu'elle s'évertuait à ne même pas lui lancer de regard. Le bruit d'une portière qui claque la sortie de ses songes. Cette portière aurait pu être celle de son coeur qui après une semaine à ne penser qu'à lui, se ferme brutalement. Elle n'éprouvait plus l'envie de se battre, trop résignée pour continuer ce drôle de jeu qui s'évertuait à détruire les participants qui avaient le malheur de s'y prêter.

Quelques secondes après elle ouvrit à son tour la porte, hésitant à la refermer, se demandant si il ne valait pas mieux qu'elle rentre en taxi. Les yeux rivés sur l'extérieur. Le souffle court. Elle sentait le regard de Solveig sur elle, c'était comme un poignard qu'on enfonçait dans son dos. La nuit enveloppante l'aidait à cacher les sentiments qui parcouraient son visage et prenait son coeur, le noyait dans un océan de douleur.

_ Démarre. Ordonna-t-elle sur un ton qui se voulait non discutable. A la fois sévère et suppliant, autoritaire et froid. Elle n'avait plus nulle envie de voir quiconque, pas même Solveig. Elle n'aspirait plus qu'à son lit, sous lequel elle se cacherait, l'appartement dont elle ne sortirait que pour voir le soleil et aspirer au repos auprès de son étalon. Elle ne daignait même plus jeter un regard à Solveig, attendant sans surprise le ronflement du moteur qui tardait à arriver.

Dawn finit par s'approcher de la voiture et ouvrit la portière d'un air résigné. Cependant, elle ne s'installa pas, gardant le regard fixé sur l'extérieur, la respiration rauque, hésitante. Elle savait que Solveig la fixait avec animosité. Elle finit par s'asseoir quelques secondes plus tard, quittant à regret l'obscurité nocturne qui masquait habilement les émotions qui passaient sur son visage.

− Démarre.

Asséna-t-elle sur un ton glacial et autoritaire. Solveig, qui n'aimait absolument pas que l'on ose lui manquer de respect et lui parler sur ce ton, n'esquissa pas le moindre mouvement indiquant qu'il s’apprêtait à faire démarrer la voiture. Il demeura silencieux, croisant les jambes, il observait toujours Dawn de son regard tranchant comme une lame de rasoir, ses sentiments postés en embuscade derrière le mur de glace au fond de ses yeux. Il n'en laissait rien paraître, mais intérieurement, il commençait à s'inquiéter de la tournure que prenait cette soirée. Dawn ne semblait plus avoir aucune envie de lui parler, ni même de le voir. S'il la ramenait au ranch, il pouvait être certain de ne jamais la revoir. Elle passerait son temps cloîtrée dans son appartement, à l'éviter. En un instant, sa décision fut prise.

− Pas tant que tu feras la gueule.

Répondit-il en verrouillant les portières.

Le ronronnement du moteur n'arrivait pas, Dawn s'agaçait de plus en plus. Elle sentait sur elle le regard azuré de Solveig, tranchant et animés d'une animosité auquel elle n'était pas habituée. Elle prenait grand soin de l'éviter, cachée derrière ce masque malhabile, en elle la tempête faisait rage. Elle aurait aimé ne jamais avoir répondu à son téléphone, accepté cette invitation. Elle aurait aimé qu'il ne l'emmène pas là. Elle l'aimait elle en étais sûre. C'était une féroce addiction, un jeu dangereux auquel elle s'était livrée et auquel elle semblait avoir perdu, elle l'avait perdu.

− Pas tant que tu feras la gueule.

Ses paroles cinglèrent dans le silence qui s'était installé, pesant, présent. Elle sursauta au son des portières qui se fermèrent. Elle était bloquée dans cette voiture avec lui, quelque part cela la réjouissait, mais elle refusait de le laisser s'en tirer ainsi. Elle commença d'abords par malgré tout essayer d'ouvrir la portière qui évidemment ne s'ouvrit pas. Elle jeta un regard faussement rancunier à Solveig et de lâcher froidement :

_ De toute façon tu as bu. Bonne nuit.

Lacha-t-elle, avant de se retourner en direction de la vitre, observant le paysage, quelque part elle était assurée que son masque tenait toujours. Une larme perla de ses yeux, elle ne pu l'empêcher de couler me retint les autres avec une certaine difficulté.

Dawn sursauta au son des verrous qui entravaient les portes, puis, comme par acquis de conscience, commença à s'acharner sur sa portière. Mais bien évidemment, elle ne s'ouvrit pas, ce qui arracha à Solveig un sourire en coin, satisfait et victorieux. La jeune femme lui répondit par un regard plein de rancœur. Elle était désormais coincée, que cela lui plaise ou non. Elle aurait pu se résigner à enterrer la hache de guerre, mais visiblement, cela ne semblait pas encore être dans ses projets.

– De toute façon tu as bu. Bonne nuit.

Cracha-t-elle sur un ton glacial, avant de lui tourner ostensiblement le dos. Solveig ne vit pas la larme amère qui coula sur sa joue à cet instant. Il se contenta de pousser un profond soupir, tout en constatant qu'elle n'avait pas tort. Deux verres de vodka. Il n'était pas soûl, mais mieux valait éviter de prendre des risques. Il n'avait pas l’intention de se tuer en voiture, ni de tuer Dawn d'ailleurs.

– C'est pas faux.

Répondit-il simplement, avant de détourner son regard de la jeune femme. Il sortit la petite boîte en fer ciselée de sa poche, et la posa sur le tableau de bord de la porsche, puis s'extirpa tant bien que mal du siège du conducteur, pour aller s'allonger sur la banquette arrière. Il poussa un second soupir plein de lassitude, puis se mit à jouer avec son revolver à double canons, le chargeant et le déchargeant successivement. Une bonne demi-heure passa ainsi, sans que l'un ou l'autre ne dise un mot ou ne s'adresse un regard. La température ambiante avait considérablement baissé, au fur et à mesure que l'heure avançait. Solveig frissonna. Il se rappela alors qu'il avait laissé son long manteau de cuir sur la plage arrière de la voiture. Esquissant un sourire satisfait, il se retourna, le déplia et l'enfila avec un soupir de contentement. Ses yeux se posèrent alors sur la jeune femme, qui feignait toujours de dormir dans son coin.

_ C'est pas faux.

Lui a t-il dit avant de détourner le regard, il y avait comme une froideur qui l'avait entouré presque immédiatement, comme si le cocon qui l'avait protégé de la tempête et qu'il avait érigé venait de s'abattre. D'une main adroite il extirpa la petite boite de sa poche et la posa tout en douceur sur le tableau de bord en cuir ébène. Gigotant en tout sens Solveig passa du siège avant à la banquette arrière, il était difficile pour Dawn de ne pas se retourner ou bien même de le retenir. Durant une trentaine de minutes Solveig passa le temps en chargeant et déchargeant son arme durant, le faisant faire un bruit métallique semblable au bruit qu'elle avait entendu plus tôt dans la soirée. Solveig se mouva à l'arrière de la voiture, du coin de l'oeil Dawn vérifia qu'il ne lui faisait pas fausse compagnie. Elle émit un faible grognement ennuyé.

De temps à autre elle jetait un fébrile regard où se lisait la tristesse à Solveig. Elle regrettait amèrement son lit à cet instant, non pas pour le confort mais par l'ennuie certain que Solveig se trouvait juste derrière elle, -à moins de deux mètres- et qu'il refusait de lui parler, où plutôt, elle avait refusé de lui parler. A plusieurs reprises, leurs regards se croisèrent furtivement. De nouveau Dawn sursauta lorsqu'au coin de la rue deux ivrognes s'insultaient en criant très fort et se jetant quelques bouteilles. Elle fit de nouveau mine de dormir bien qu'elle en fut incapable à cause du froid sans doute. Elle eu beau ce recroqueviller sur elle-même, ses os se gelaient petit à petit. De la même manière que Solveig elle s'extirpa de son siège pour le rejoindre. Elle se fit une petite place près de lui et se serra contre lui, un frisson lui parcourra alors l'échine.

Le silence commençait à devenir pesant entre eux, uniquement troublé par le faible chuchotement de leur respiration. Soudain, deux hommes, apparemment dans un état d'ivresse avancé, passèrent devant la voiture en criant et en se jetant des bouteilles de bière vides à la figure. Solveig se raidit, chargeant à nouveau son revolver. Mais il n'eut même pas besoin de s'en servir, les deux lascars ne remarquèrent pas la présence de deux personnes dans la porsche noire, c'est même tout juste s'ils remarquèrent qu'une voiture était garée là , bien trop absorbés par leur dispute d'alcooliques sans raison ni sens.

Solveig soupira, avant de décharger une énième fois son arme et de la laisser doucement tomber à côté de lui, d'un geste las. Il sursauta alors en entendant Dawn se redresser sur son siège. Elle se retourna et se contorsionna pendant quelques secondes, avant de réussir à le rejoindre sur la banquette arrière. Elle vint alors se serrer contre lui, toute tremblante. Tout d'abord surpris, Solveig ne dit pas un mot, se contentant de la dévisager avec étonnement. Était-ce uniquement à cause du froid, qu'elle venait s'asseoir près de lui, ou bien avait-elle enfin décider de lui pardonner... Il fronça légèrement les sourcils, mais bientôt son expression suspicieuse se mua en un sourire en coin attendri, et il l'entoura doucement de ses bras. Un frisson de plaisir vint alors courir le long de sa colonne vertébrale. Pourvu que cela dure. Pourvu qu'elle ne lui échappe pas encore une fois...

– Tu m'en veux encore ?...

Murmura-t-il en lui jetant un regard penaud.

L'expression froide de Solveig s'adoucit, un sourire en coin se dessina doucement sur son visage, ses traits devinrent plus conciliant. Doucement ses bras entourèrent Dawn, elle n'opposa aucune résistance, bien au contraire, elle se lova contre lui, elle l'avait enfin retrouvé. L'idée de le voir dans les bras d'une autre lui donnait la nausée et le goût du sang.

- Tu m'en veux encore ?...

Elle ne répondit pas tout de suite, préférant presque le silence aux mots, elle en avait parfois presque peur. Eux, qui avait détruit tellement de choses, elle préférait les gestes aux futiles promesses. Oui, elle lui en avait voulu. Énormément, mais les sentiments qu'elle éprouvait pour lui, lui avait offert la possibilité de pardonner chaque seconde de cette soirée. Les flammes qui avaient ravagés son coeur et le désert de la glace de ses yeux appartenait au passé.

_ Non, mais je le devrais.

Annonça-t-elle dans un murmure que cadençait les battements irréguliers de son coeur trop abîmés par les regrets et les mensonges des sentiments, les tromperies et les oublis, elle qui s'était promis de ne plus jamais devoir dépendre de quelqu'un, la voilà qui de nouveau ne pouvait plus se passer de celui qu'elle avait rencontré dans un restaurant à cause d'une simple erreur de personne. Si ses parents avaient vu cela, elle entendait déjà les sermons et les promesses d'un coeur brisé. De toute façon si ils étaient encore ses contemporains elle ne leur en aurait pas craché un seul mot. Pas tout de suite en tout cas...

Elle se déchira aux bras de Solveig pour attraper la petite boite de fer ciselés par un homme de l'Arabie, cet inconnu qu'elle ne verra jamais, lui qui leur avait offerte droit de jouer, leur jeu de séduction. Elle la contempla un instant. Puis se lova de nouveau contre Solveig, la boite au creux de sa main, contemplant l'objet elle murmura :

_ Angie... et toi... enfin je veux dire... Tu ressens quelque chose pour elle ?

La jeune femme ne répondit pas immédiatement. Elle semblait réfléchir à ses paroles, s'interroger sur ses sentiments. Cependant, elle n'opposa aucune résistance lorsque Solveig l'étreignit, bien au contraire. Elle vint se serrer contre lui avec un soulagement qu'il devinait derrière ses paupières momentanément closes. Elle lui en avait voulu à un point inimaginable, il n'en doutait pas une seconde, mais à présent qu'elle le dévisageait, son regard s'était fait plus doux. C'était fini. Ils s'étaient retrouvés.

– Non, mais je devrais.

Murmura-t-elle en esquissant un geste rapide, comme pour tenter de masquer le faible bruissement émis par les battements de son coeur. Mais c'était peine perdue. Solveig laissa échapper un sourire en coin. Ce coeur, qui galopait avec tant de fougue en battements irréguliers, il le sentait marteler contre sa propre poitrine. Chaque battement se mêlait aux pulsations du sien. Ces deux coeurs qui battaient l'un pour l'autre... Mais cela, aucun de leur deux propriétaires ne semblait décidé à se l'avouer.

Elle se redressa soudain et quitta un instant la chaleur de ses bras, pour attraper sur le tableau de bord la petite boîte en fer ciselé, devenue si familière. Puis elle vint se lover à nouveau contre son torse, à la manière d'un chat qui retrouverait son coussin favori, et contempla silencieusement l'objet de leur jeu. A cet instant, elle semblait terriblement préoccupée. Solveig ne pouvait distinguer son visage, mais elle était crispée, rongée par l'inquiétude, il le sentait dans la raideur de son corps et de ses mouvements.

– Angie... et toi... enfin je veux dire... Tu ressens quelque chose pour elle ?

Solveig demeura un instant silencieux, puis éclata de rire. Il n'était nullement troublé par cette question, vu le tempérament jaloux et possessif de son amie, il s'y était attendu. Mais le fait que ce sujet la tourmente tant, sachant ce qu'il savait, l'amusait beaucoup. Dawn, beaucoup moins. Mais évidemment, elle, elle ne pouvait pas deviner...

– C'est donc ça qui te préoccupe tant... Tu n'as aucun souci à te faire, tu sais. Angie et moi, c'est purement physique. Enfin c'était. Et encore, ça n'est arrivé qu'une fois. J'étais bourré. Et puis, elle bosse pour moi... en quelques sortes. L'amour et les affaires ne font pas bon ménage, généralement j'évite de mélanger les deux.

Le silence qui s'était installé pesait lourd dans le coeur de Dawn. Elle avait peur qu'il ne réponde pas lui offrant alors la possibilité d'envisager tous les scénarios possibles. Elle avait peur et détestais ce silence. Il fut bientôt tranché par le rire amusé de Solveig, Dawn un peu décontenancé et mécontente, déposa une petite tape sur le torse de l'homme.

- C'est donc ça qui te préoccupe tant... Tu n'as aucun souci à te faire, tu sais. Angie et moi, c'est purement physique. Enfin c'était. Et encore, ça n'est arrivé qu'une fois. J'étais bourré. Et puis, elle bosse pour moi... en quelques sortes. L'amour et les affaires ne font pas bon ménage, généralement j'évite de mélanger les deux.

Elle eu envie de se révolter, mais finalement c'était bien peu, bien peu de choses contrairement à ce qu'elle avait imaginé. Elle sentait autour d'elle les bras de l'homme qui la serrai et qui l'enveloppait comme pour la protéger des méandres de la vie. Les chimères de ses craintes doucement s'estompaient. Elle avait posé sa tête contre le torse de Solveig. Poum... Poum... Poum... C'était les raisonnements de son coeur dans le corps de Dawn. Elle ferma doucement les yeux puis sourit un instant. Elle rouvrit les yeux et les plongea dans le bleu nuit de ceux de Solveig. Elle lui tendit la petite boite d'un air taquin.

_ Et en quoi elle travaille pour toi ? C'est la chef de ton réseau de prostitution à Bagdad ?

Le charriait-elle un instant. Bien sûre elle avait une petite idée de ce qui se tramait dans ce qu'il ne voulait pas lui avouer. Elle avait seulement envie de voir jusqu'où il serait sincère, elle avait envie de repousser encore un peu les limites sans pour autant perdre le cocon dans lequel elle s'était lovée. La nuit doucement avançait mais se refusait toujours à décliner et ni lui, ni elle n'avait fermé les yeux durant ces quelques heures.

Dawn lui asséna une tape sur le torse d'un air presque indigné. Apparemment, elle ne semblait pas apprécier le récit de l'aventure qu'avait eu Solveig avec la propriétaire du bar d'où ils sortaient. Encore heureux qu'il lui ait passé les détails, autrement, c'est sans doute plus qu'une tape qu'il aurait reçu... Mais le détail ne semblait pas être la préoccupation principale de Dawn, fort heureusement. Elle semblait rassurée de constater qu'il n'y avait eu entre eux qu'une courte histoire, et pas vraiment de sentiments. Du moins, du côté de Solveig. Il ressentait pour Angie une certaine sympathie – après tout, elle travaillait pour lui depuis déjà quelques années – mais avec le temps, il exécrait de plus en plus son look vulgaire et ses manières de l'aguicher ouvertement à chaque fois qu'ils se voyaient. Surtout maintenant qu'il y avait Dawn... Enfin, une chose était sûre, maintenant il savait qu'il ne devait plus l'amener à cet endroit.

Doucement, Dawn vint poser sa tête contre le torse de l'homme. Ce dernier sentit alors un nouveau frisson courir le long de son dos. Fermant les yeux l'espace d'une seconde, il se mordit la lèvre. Dieu, ce qu'il pouvait aimer ce contact... Elle leva la tête vers lui et plongea alors son regard d'émeraude dans le sien, un sourire malicieux flottant sur ses lèvres.

– Et en quoi elle travaille pour toi ? C'est la chef de ton réseau de prostitution à Bagdad ?

Ironisa-t-elle en lui tendant la boîte. Solveig se saisit de l'objet, affichant un air faussement offusqué , mais ne put se retenir de rire à nouveau. Machinalement, il se mit à jouer avec une mèche de cheveux de Dawn, l'enroulant doucement autour de son doigt.

– Non, pas exactement. Je ne suis pas un proxénète, moi, bien qu'on m'ai dit plusieurs fois que j'ai la tête de l'emploi... Hem. Tu vois, sans la coke que je fournis à Angie pour qu'elle puisse attirer ses camés de clients dans son bar – si on peut appeler ça comme ça, ce trou à rats serait vide. Et moi, ça me ferait du fric en moins. C'est elle qui m'a proposé cette affaire, ça doit faire trois ou quatre ans maintenant. Et comme on y gagnait tous les deux, j'ai accepté. Le business, quoi.

C'était bien la première fois que Solveig parlait aussi librement et sincèrement de son trafic à quelqu'un qui y était totalement extérieur. Même avec ses associés, il employait un vocabulaire soigneusement étudié, par peur d'être placé sur écoute et repéré par les autorités. Mais Dawn... Non. Il lui faisait confiance. Il se disait qu'au pire... SI elle s'avérait être une saleté de flic infiltrée, il la liquiderait. A contre-coeur et avec une peine inimaginable, certes... Mais il préférait ne pas penser à cela, et demeurer dans l'espoir que la jeune femme assise à ses côtés soit véritablement ce qu'il espérait.

Les battements du coeur de Solveig changèrent une seconde, elle leva les yeux vers lui et put percevoir qu'il se mordait la lèvre, ce qui lui arracha un sourire satisfait, elle avait eu la confirmation qu'elle lui plaisait. Mais il y avait toujours ces sentiments étranges et contradictoires qui l'empêchaient de tout lui dire. Aux mots de Dawn il avait alors engagé sur son visage un air faussement froissé, mais un rire s'échappa alors de sa cage thoracique. Il s'était saisi d'une des mèches bordeaux de la jeune femme, presque immédiatement elle afficha un sourire bienheureux.

- Non, pas exactement. Je ne suis pas un proxénète, moi, bien qu'on m'ia dit plusieurs fois que j'ai la tête de l'emploi... Hem. Tu vois, sans la coke que je fournis à Angie pour qu'elle puisse attirer ses camés de clients dans son bar - si on peut appeler ça comme ça, ce trou à rats serait vide. Et moi, ça me ferait du fric en moins. C'est elle qui m'a proposé cette affaire, ça doit faire trois ou quatre ans maintenant. Et comme on y gagnait tous les deux, j'ai accepté. Le business, quoi.

Elle eu un petit rire déplacer suite aux mots qui était sorti de la bouche de Solveig.

_ En effet, d'ailleurs c'est ce que je me suis dit en te voyant dans ce restaurant.

S'amusa-t-elle. Elle entoura alors l'homme de son bras gauche tandis que l'autre était resté posé sur son torse. Tandis que son visage était parti ce nicher dans le cou de l'homme elle resta ainsi quelques minutes puis imita quelques toussotements et conclua ironique :

_ Tu pus, j'ai l'impression d'être collée à Angie.

Dit elle reposant sa tête contre lui, bercée par les bruits de son coeur réglé comme un carrousel. Soudain elle se figea, et si... si ce carrousel s'arrêtait un jour... Elle préféra chasser rapidement cette pensée de sa tête et se serra encore un peu plus contre lui, comme pour s'assurer que c'était réellement lui et non un rêve...

– En effet, d'ailleurs c'est ce que je me suis dit en te voyant dans ce restaurant.

Répondit la jeune femme en riant. Solveig la dévisagea alors avec des yeux ronds. Il se rappelait de la fois où Kim, pour plaisanter, lui avait dit qu'il avait tout à fait la bonne tête pour se lancer dans le trafic de prostituées. Il avait rit avec lui et n'y avait plus pensé ensuite. Et maintenant voilà que Dawn pensait la même chose. Il n'en revenait littéralement pas.

– Eh bah, ça fait toujours plaisir. Dit-il en riant à son tour. Seulement moi, vois-tu, j'ai quand même un certain respect pour les femmes. Respect que certaines n'ont pas en retour à mon égard, d'ailleurs...

Dawn l'entoura alors de ses bras, laissant l'une de ses mains posée sur son torse, et vint doucement appuyer son visage contre son cou. Solveig laissa échapper un soupir à peine audible. Non, décidément, cette jeune femme ne le laissait pas indifférent. Elle se mit alors à tousser de manière théâtrale, avant de lever vers lui un regard plein d'ironie.

– Tu pues, j'ai l'impression d'être collée à Angie !

Solveig éclata à nouveau de rire. Décidément, l'alcool ne leur réussissait pas. Ni à elle, qui débitait de drôle de pensées, ni à lui, qui se mettait à rire comme l'aurait fait un gamin de huit ans. La jeune femme avait reposé sa tête contre son torse. Il inspira doucement. C'est vrai, il pouvait encore déceler sur ses vêtements quelques bribes du parfum sucré d'Angie, qui étaient peu à peu effacées par celui de Dawn, fort heureusement. Elle lui évoqua un instant l'attitude des chats, qui ont l'étrange manie de se frotter sur tout ce qu'ils considèrent comme leur propriété, pour y laisser leur odeur et marquer leur territoire. Etait-il en quelque sorte devenu la propriété de Dawn ? Cette pensée le fit rire de plus belle.

– De mieux en mieux. Tiens, d'ailleurs on a le même décolleté, elle et moi.

Répondit-il en ouvrant un bouton de plus à sa chemise, un sourire taquin éclairant toujours son visage. Il était près de deux heures du matin, il s'était enfilé deux vodka orange, il avait failli perdre la femme de sa vie. Et maintenant ils étaient là, à l'arrière d'une voiture et riaient comme deux enfants. Une soirée pleine de rebondissement, en somme. Et la nuit était loin d'être finie. Décidément, à chaque fois que Solveig passait du temps avec Dawn, il n'était jamais déçu du voyage.